Vidange du Lac de Vioreau :

 

Il y a 20 ans se déroulait la dernière vidange partielle du Lac de Vioreau, le plus grand plan d’eau de Loire-Atlantique. En 2022, ce fleuron de la pêche nord-ligérienne qui devait subir des travaux de confortement et de modernisation de son barrage a conduit son gestionnaire, le Département de Loire-Atlantique, à procéder à la vidange du lac.
Naturellement, les pêches de sauvegarde ont été confiées à la Fédération Départementale de Pêche et de Protection du Milieu Aquatique.

 

Un trio efficace : Le Département, la pêche associative et le pisciculteur

Depuis 2007 et la rétrocession de la propriété des voies navigables de l’état aux collectivités territoriales, c’est le Département de Loire-Atlantique qui en est le gestionnaire et est de fait en charge de l’entretien du lit, des berges et de la rénovation et la mise aux normes des ouvrages d’art (les barrages, quais, ponts et autres écluses).
C’est dans ce contexte de rénovation et de confortement du barrage du grand réservoir de Vioreau que la vidange du plan d’eau a du s’effectuer.

Avec une superficie de 180 hectares et près de 8 millions de mètres cubes d’eau, il fallait s’attendre à une population de poissons non négligeable… La fédération départementale et son puissant réseau associatif ont fait appel pour les épauler à un pisciculteur professionnel, déjà impliqué territorialement à Vioreau : la pisciculture du bocage basée dans les Deux-Sèvres est en effet, l’un des fournisseurs réguliers et de confiance des structures associatives de la pêche de loisir du 44. À ce titre, le pisciculteur s’est vu attribuer par la Fédération de pêche 44 une partie de la sous-traitance.

 

Un vivier de bénévoles impliqués

Pêcher une pièce d’eau comme le grand Vioreau ne s’improvise pas.
Il faut des moyens matériels certes, mais l’essentiel est dans l’humain :
une équipe de professionnels rompue aux usages et aux bons gestes et des effectifs nombreux et dévoués qui n’ont peur ni du froid, ni de l’eau glacée, et encore moins de se salir les mains pour sauvegarder le patrimoine piscicole riche et abondant du lac de Vioreau… C’est là, toute la force du réseau de la pêche associative, sa colonne vertébrale !
«Lors des 20 pêches réalisées entre les mois de Novembre 2022 et Février 2023, plus de 70 bénévoles de tous âges sont venus prêter main forte aux salariés de la fédération de pêche et au pisciculteur, portant les effectifs totaux à 346 hommes/jour ! Une implication à cette échelle est rare dans le milieu associatif et nous essayons d’entretenir des liens forts» explique Bernard HAMON, le Président de la Fédération de Pêche 44. Une organisation réglée au métronome par l’AAPPMA locale, l’Amicale des Pêcheurs de Vioreau, qui s’est occupée de toute la logistique catering* pour nourrir tout ce petit monde, ajoutant ainsi la dimension conviviale à cette belle cohésion ! Et des poissons… Ils voulaient en voir, ils en ont vu… Par dizaines de tonnes !

 

47 Tonnes de poissons ont été sauvegardées et déplacées dans les eaux gérées par les AAPPMA
de Loire-Atlantique !

À chaque fois qu’une grande pièce d’eau s’apprête à être vidée, les pêcheurs locaux s’y pressent pour vérifier les «mythes et légendes» qui lui sont attribués.
Les eaux sombres du lac sont le théâtre des extravagances de pêcheurs et d’autres fantasmes d’énormes créatures qui hanteraient ses profondeurs…

Dans le lac de Vioreau, cette part de mystère restera certainement intacte car une partie du réservoir est restée en eau et s’il n’y a pas eu de «monstre» sorti des eaux du lac, c’est sur le chiffre honorable de 47 tonnes de poissons pêchés que se concluent les dernières pêches !

La plupart des pêcheurs habitués du lac de Vioreau ne s’attendaient certes pas à autant de poissons et notamment autant de sandres (Sander luscioperca)… Plus de 5 tonnes de ce grand carnassier dont la plupart dépassait allègrement la taille légale de capture, soit plus de 0.50 mètre avec des sujets s’approchant du mètre !

 

Le poisson le plus représenté : La Brème

Sur l’ensemble du cheptel récupéré, c’est la Brème qui bat tous les records ! Avec un effectif de plus de 36 tonnes et des individus bien répartis dans la pyramide des âges, la Brème est incontestablement l’espèce dominante des eaux du grand Vioreau.
Ce poisson dit «fourrage» fait partie des proies ciblées par les poissons carnassiers comme le Sandre ou le Brochet, mais une telle population refléte également une prédation faible. Le ratio prédateurs/prédatés semble bien déséquilibré…

La vidange d’une pièce d’eau est toujours une bonne occasion pour analyser l’état du peuplement piscicole. Dans le grand Vioreau, les espèces recensées sont conformes aux attentes dans ce type de milieu, cf liste ci-dessous.

 

Des espèces patrimoniales, et une petite surprise !

Parmi les poissons pêchés, des espèces patrimoniales et protégées…
Le Brochet et l’Anguille européenne sont les deux espèces-repères des eaux de notre département.
L’analyse des populations de brochets du lac de Vioreau démontre que cette espèce est largement sous-représentée dans ce milieu. La raison de ces sous-effectifs provient essentiellement de leurs habitats presque inexistants. En effet, presque aucune végétation aquatique ou rivulaire n’est accessible au brochet sur Vioreau, cette végétation qui joue un rôle essentiel dans le cycle du brochet.
Par ailleurs la présence de l’Anguille européenne semble, elle aussi, sous- représentée à Vioreau : si l’on sait qu’elle est présente pour avoir capturé quelques spécimens, la question de la continuité écologique de l’espèce va très vite se poser : le barrage n’est pour l’heure pas équipé pour permettre le franchissement de ce poisson en danger critique d’extinction (Sources UICN).

La bonne surprise viendra de la découverte d’une espèce patrimoniale protégée à l’échelle européenne : la Bouvière.

Ce petit cyprinidé d’intérêt communautaire est cité dans la directive « Habitats, faune, flore » en annexe II. La Bouvière est une espèce protégée qui doit être prise en compte notamment dans les évaluations des incidences des sites Natura 2000. Sa particularité tient en son mode de reproduction qui dépend d’une moule d’eau douce (type d’association : commensalisme*).
Ce poisson n’avait jamais été contacté auparavant dans les eaux de Vioreau.

 

Une campagne d’actions écologiques et d’amélioration des habitats pour pallier les sous-représentations de certaines espèces…

Grâce à une convention de partenariat passée avec le Département, la fédération va profiter de la vidange pour disposer au fond du lac des structures minérales et végétales en faveur des poissons : diversité des habitats, création de supports de pontes spécifiques et création de refuges. En effet, le fond du lac de Vioreau est désespérément uniforme ce qui n’offre pas d’habitats diversifiés. Et comme l’expliquent tous les manuels d’Écologie : la diversité des habitats fait la diversité des espèces !
Actions écologiques réalisées avec l’AAPPMA l’Amicale des Pêcheurs de Vioreau et un soutien attendu de la commune de Joué/Erdre.

 

Repeuplement du lac : un étalement sur 3 ans !

Le repeuplement de cette vaste retenue de 180 Hectares est déjà en préparation pour un budget minimum de près de 40 K€ !
Ce repeuplement va être progressif sur 3 ans. Les réintroductions de poissons vont concerner les espèces Brochet, Perche commune, Gardon, Carpe et Sandre. Les hélophytes* installées depuis la vidange sont un excellent support de pontes pour les brochets et les cyprinidés, et la fédération compte bien sur leur efficacité durant la première année de remise en eau.
Concernant le Sandre, la fédération souhaite également favoriser sa reproduction naturelle uniquement grâce aux poissons stockés dans l’étang de Vioreau, qui seront redéplacés. Quant à la Carpe, l’objectif est de réinstaller sa population en garantissant une répartition en faveur de l’équilibre écologique du lac.